A Moscou, dans le début des années 60, trois camarades dont les pères sont morts à la guerre, Sergueï, Slava et Nikolaï, s'interrogent sur leur avenir, le sens de la vie et cherchent, sans grand enthousiasme, leur place dans la société.
Réalisé en 1961-62, le film, dont le titre était La Porte d’Ilitch, a dû être montré en 1963, avant sa sortie, à Khrouchtchev qui a ainsi exprimé son jugement: « Même les figures les plus positives de ce film – trois ouvriers – ne personnifient pas notre grandiose jeunesse. Ils sont montrés comme s’ils ne savaient rien de la vie qu’ils ont à mener, de ce vers quoi ils doivent tendre. Et cela dans notre époque de progression et de la construction du communisme, éclairée par les idées du programme du Parti communiste ! Une telle jeunesse construira-t-elle donc le communisme avec ses pères, sous la direction du Parti ? Non, la société ne peut pas s’appuyer sur de tels hommes, ce ne sont ni des combattants, ni des transformateurs du monde. Ce sont des hommes moralement infirmes, déjà vieillis dans leur jeunesse, à qui échappent les buts et les tâches élevés de la vie ».
Le réalisateur fut obligé de remanier son film, ce qu’il réussit à faire, selon ses propres termes « en conservant le sens de l’oeuvre » Avant tout, écrit-il, « j’ai dû supprimer les scènes qui n’avaient pas plu à Khroutchev. J’ai enlevé la scène de la soirée des poètes. Surtout j’ai dû retourner la scène avec le fantôme du père »
En 1988 Marlen Khoutsiev restaurera la version originale.
"<...> Les personnages de Khoutsiev ne détiennent pas de vérité a priori, ils ont simplement envie de se trouver. Ils vivent dans un pays auquel ils tiennent, ils conservent la conviction qu'il est unique, une utopie réalisée, tout en étant marqués par la blessure encore ouverte du stalinisme, par celle encore ouverte de la guerre. Parfois ils disent l'un pour l'autre. Un des plus beaux moments de Faubourg d'Ilytch est le toast que porte son héros aux choses qu'il "prend au sérieux . Parmi celles-ci, il mentionne "le fait que presque aucun d'entre nous n'a de père . Celui de Serioja est tombé au combat, et un peu plus tard, la rencontre entre le père mort à vingt et un ans et le fils de vingt-trois est un des grands moments du cinéma soviétique. Mais le spectateur des années soixante ne pouvait manquer de penser à d'autres circonstances, à d'autres pères disparus, comme celui de Marlen Khoutsiev, arrêté en 1937.<...>"
Bernard Eisenchitz. Source : www.festival-larochelle.org