C’est la Russie du début du XXème siècle. On déplore de nombreux attentats terroristes visant des personnalités occupant des postes élevés à la direction de l’Etat. Le but principal des terroristes est l’assassinat du Grand Prince Sergueï Alexandrovitch. Ils sont membres de « L’Organisation combattante » dirigée par un certain Georges. La préparation des attentats découvre la psychologie et les sentiments de chacun des terroristes. Chacun a ses propres motivations : vengeance, amour des proches, foi en un avenir radieux… Mais les tentatives échouent les unes après les autres et les terroristes sont tués les uns après les autres et il ne reste plus que le chef Georges. Celui-ci réalise soudain que l’assassinat du Grand Prince est en train de devenir l’unique sens de sa vie et que pour l’accomplir, il est prêt à tout. Mais après l’acte, le désenchantement.
Le film est réalisé d'après la nouvelle Le Cheval blême ( Конь бледный ) écrit en 1909 par le chef du groupe terroriste « L’Organisation combattante » ( Боевая организация ) Boris Savinkov sous le pseudonyme V. Popchine. Cette organisation a accompli un certains nombre d’actes terroristes au début du XXème siècle. Leur but était l’assassinat du Grand Prince Sergueï Alexandrovitch.
Le tournage a commencé le 28 juin 2003 dans les décors fantastiques construits dans le légendaire Premier Pavillon des studios Mosfilm. Les scènes de foule ont utilisé plus de 300 figurants. Les scènes non tournées en studio l’ont été dans le palais d’Ostenkino, au Kremlin, dans les bains Sandounovski, au village impérial, dans les rues de Saint-Pétersbourg, au palais de Youssoupovski, dans la forteresse de Petropablovsk… Le tournage a duré trois mois.
Interview de Karen Chakhnazarov :
Qu’est-ce qui vous a intéressé dans le livre d’un terroriste au sujet du terrorisme ? Le thème est très actuel. Je crains que demain il ne le soit encore plus. Le roman de Savinkov m’intéresse depuis longtemps, de même que la personnalité de l’auteur. C’est le premier terroriste du XXème siècle adepte non seulement de la philosophie de Nietzsche mais, aussi étrange que cela puisse paraître, de celle de Dostoievski.
C’est un livre autobiographique. Mais en réalisant ce film nous avons constamment pensé qu’il s’agissait d’un film de fiction et non d’un documentaire. On trouve dans le film les mêmes personnages et en partie les mêmes dialogues que dans les Souvenirs d’un terroriste.
Quelles autres sources historiques avez-vous encore utilisées ?
L’auteur du scénario, Alexandre Biridianski est parti de la nouvelle Un cheval blême. Mais il a aussi utilisé beaucoup de faits réels de l’époque comme par exemple l’assassinat de Stolypine Et nous nous sommes permis d’ajouter au fond historique des éléments fictifs.
Si on en juge par la demande en figurants, le film est un film à grand spectacle avec des scènes de foule.
C’était important de recréer l’atmosphère des rues de Moscou. De nos jours il est à la mode de filmer à l’économie : les villes sont vides et les passants solitaires. Mais cela ne va pas. A cette époque Moscou était pleine de gens. Et on a voulu bien donner la meilleure image possible de la vie à cette époque.
Le sujet est « chaud », beaucoup s’attendent à un film d’action. Est-ce le cas ?
C’est un drame psychologique avec des éléments d’action. Le scénario est très efficace, peu bavard et les considérations philosophiques sont limitées à l’indispensable.
Dans le sous-titre du roman, une sorte d’apocalypse : « Cheval blême, et dessus un cavalier dont le nom est La mort ; et derrière lui c’est l’enfer, et il dispose, sur un quart de la Terre, du pouvoir de destruction par le glaive et la faim. » Dans quelle mesure ces éléments existent-ils dans le film ?
Le film sort sous le titre de Le Chevalier nommé la mort Quant aux éléments du sous-titre, ce serait bien si les spectateurs les ressentaient dans le film, mais ce n’est pas à moi de le dire.
Y a-t-il un parallèle avec la situation d’aujourd’hui ?
Quand je vois le film, je comprends que cette idée viendra obligatoirement à l’esprit des spectateurs. C’est une situation unique où l’un des rois du terrorisme, connu du monde entier, analyse le sens de sa propre action. Savinkov a été ministre des Armées dans le gouvernement de Kerenski et a joué un rôle très important dans l’histoire de la Russie de cette période. C’était un idéologue et Mussolini le considérait comme un maître. Il s’est en outre révélé écrivain talentueux, sans complaisance à l’égard de lui-même. Il analyse et son monde intérieur et le monde du terrorisme. Il décrit avec beaucoup d’exactitude le caractère des différents types de personnes qui rejoignent le terrorisme et les motivations qui les habitent. Qui d’autre peut connaître aussi profondément ce problème ? Même si on ne peut nier l’effet spectacle, l’homme sait de quoi il parle. Et pour faire un parallèle, c’est comme si Ben Laden écrivait un roman sur le terrorisme. Savinkov est le Ben Laden du siècle dernier, mais derrière lui il y avait toute la culture du XIXème siècle, c’était un gentilhomme de vieille souche, il était membre des cercles littéraires de Hippious, Merejkovski.
Qu’est-ce qui était le plus difficile dans votre travail ?
Recréer l’atmosphère de l’époque. La vie a changé et il nous a fallu reconstruire le vieux Moscou à « Mosfilm ». La décoratrice Lioudmila Koussakova a construit des décors qui, selon moi sont très bons. Je filme rapidement et ce film long aux nombreux décors et scènes de foules a été tourné en 12 semaines.