Prix au Festival de Toronto, 2002
Prix du meilleur film au Festival "Vivat Kino Rossii" à Saint-Petersbourg, 2003
Mention spéciale au Festival de San Francisco,2003
Le film se passe entièrement dans le palais de l’Ermitage, ancienne demeure des tsars depuis Pierre le Grand.
Un cinéaste contemporain, invisible, suit les déambulations incertaines, à travers les escaliers et les salles de l’Ermitage, d’un personnage vêtu de noir. Trois règnes emblématiques de la grandeur des tsars surgissent au cours de ce voyage à travers le temps : celui de Pierre Ier, en une scène quasi hallucinatoire de sombre violence dans un recoin obscur du palais ; celui de Catherine II, éclatant et théâtral, dans la lumière éblouissante des salles d’apparat ; enfin celui de Nicolas II, enveloppé de désir et d’angoisse, dans l’intimité d’un tableau de famille. Au cours d’une conversation murmurée et décalée, les deux spectateurs interrogent les trésors du musée: la grandeur impériale n’a-t-elle été qu’ une imposture, masquée par un emprunt de façade à la culture européenne? D’abord implacable contempteur du mensonge dont il accuse les œuvres d’art de l’Ermitage d’être le symbole ou le symptôme, le visiteur étranger glisse insensiblement dans la contemplation des tableaux de Van Dyck, de Rubens, pénétré par le mystère suave et étrange de l’atmosphère slave qui métamorphose et authentifie toute chose. Peu à peu, l’inconnu, envoûté, se « dissout » dans la foule du bal, dont la rumeur, qui enfle depuis le début du film, se transforme en une immense fête impériale, éclatante et crépusculaire.
Le visiteur est le marquis de Custine : personnage au passé tragique (son père et son grand-père ont été guillotinés pendant la Révolution française), romantique désabusé, écrivain et diplomate en Russie ( dont il a rapporté un livre La Russie en 1839), il est un témoin exemplaire de la puissance des tsars. Nouveau Dante, il traverse les cercles du brillant enfer que s’est construit l’empire. Tel un spectre encore, il hante l’histoire russe, dont la voix du cinéaste lui suggère la parenté avec sa propre histoire.
Le film a été tourné en un seul plan-séquence de 95 minutes : il emporte ainsi le spectateur dans la spirale de ce rêve éveillé qu’est l’histoire. L’Ermitage est-il une arche d’alliance, une arche de Noé…ou un « Titanic » émergé ? Le mouvement ininterrompu de cette longue promenade dans le musée-arche fait du regard la source d’une méditation qui « se noie » dans l’ultime image d’une porte battante, sur l’eau.