Pendant toute la guerre et malgré les multiples épreuves qu'ils doivent affronter, l'artilleur Vassili Koudriachov et l'éducatrice de jardin d'enfants Varia Pankova gardent l'espoir et décident qu'ils se retrouveront à Moscou à six heures du soir le jour de la victoire!
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"Selon un vieil adage, « quand les canons parlent, les muses se taisent. » Mais ce dicton a parfois été contredit. Ainsi, la musique ne s’est pas tue pendant les terribles années de la guerre Patriotique (1941-1945). Au contraire, de nombreux films musicaux furent tournés et moult spectacles furent mis en scène. Des comédiens, des musiciens et des chanteurs se rendaient sur le front. (...)
Les canons grondaient encore que les personnages du film de Ivan Pyriev commençaient déjà à se donner rendez-vous dans la vie d’après-guerre. La foi du réalisateur dans la force de l’art cinématographique était restée inébranlable. Pyriev était persuadé que c’étaient précisément les films qui, lors des moments difficiles, pouvaient permettre aux gens de souffler en leur donnant du plaisir, en leur redonnant espoir et foi. Voilà pourquoi les personnages de films devaient être beaux et bons, voilà pourquoi ils devaient être capables de vaincre leurs ennemis comme leurs propres faiblesses. Telle était, pour Pyriev, la condition pour que les spectateurs aient envie de les imiter. Au moment de la sortie de A six heures du soir, après la guerre, les acteurs qui jouaient les rôles principaux, Marina Ladynina et Evgeni Samoïlov , étaient déjà connus du grand public et leur prestation était attendue avec impatience. (...). L’histoire du film, écrite en 1943, est simple, voire naïve. Au tout début de la guerre, un artilleur noue une idylle avec une jeune institutrice que ses petits élèves appellent « tante Varia ». De dures épreuves commencent alors. L’artilleur, sérieusement blessé, craint de devenir un fardeau pour sa bien-aimée. Varia, quant à elle, s’engage dans la DCA. Pourtant, les deux personnages sont habités par la certitude que, tôt ou tard, tout cela finira bien. La trame du film est donc extrêmement lisible, presque simpliste. Les évènements sont les fruits du hasard, les conséquences de coïncidences. Cette narration révèle que pour Pyriev, les gens méritent aussi leur part de miracles. Aussi n’y a-t-il rien d’étonnant à ce que ses personnages expriment leurs sentiments en chantant ou par le biais de la poésie. Dans ce film, ce ne sont pas les lois de la vie réelle qui règnent, mais celles d’un monde idéal, à la fois juste, humain et heureux. Bref, les règles que Pyriev affirmait dans ses comédies musicales et qu’il proposait aux spectateurs comme but, comme possibilité et comme mode d’action. A six heures du soir, après la guerre semble être plus sobre que les autres films-contes ou films-utopie de Pyriev. Malgré son côté naïf et approximatif peu fidèle à la réalité de la guerre, malgré l’évidence de son message et de sa raison d’être, et malgré une tendance à la juxtaposition de certaines images, le film possède un charme particulier que vient souligner la musique de T. Khrennikov. La fête de la victoire aura forcément lieu très bientôt : telle était la logique implacable de la volonté du peuple. C’est cette certitude qui fut bien comprise par Pyriev. Pour ce réalisateur, le jour de la fête eut lieu bien avant le mois de mai 1945, dès 1944 – car son film annonçait déjà la victoire en guidant les gens vers une vie nouvelle et paisible dans laquelle chacun se devait d’entrer avec fierté et avec l’impératif d’être heureux.
Extraits de l'article deIrina Chilova publié par l'encyclopédie Kirill et Mefodi(Кирилл и Мефодий)
Traduit du russe par Véra Kolessina