Alexandre Askoldov est né à Moscou en 1932. Il a d’abord fait des études littéraires avant de suivre l’enseignement des Cours supérieurs de mise en scène à Moscou.
Son premier et unique film La Commissaire fut interdit pendant 20 ans. Askoldov fut exclu du parti communiste et ne fut plus autorisé à travailler comme réalisateur. Il a quitté l’Union soviétique à une date non connue et a enseigné dans divers pays. Il a écrit un roman Le Retour à Jérusalem, traduit dans plusieurs langues à partir duquel il avait le projet de réaliser un film avec Rolan Bykov. Mais ce projet n'a jamais été réalisé.
Décédé en Suède le21 mai 2018 des suites d'une longue maladie. Sera enterré en Suède où résident sa fille et sa petite-fille.
Un long entretien avec le réalisateur de La Commissaire. Il revient sur son enfance, et la mort de son père fusillé par Staline, à l’origine de son engagement contre le pouvoir soviétique. Il raconte longuement l’histoire de son film, de la censure appliquée dès la première diffusion en 1967, à son discours en 1987 au Festival du film de Moscou, qui aurait conduit Gabriel García Márquez à demander à Mikhaïl Gorbatchev de lever l’interdiction. Il explique aussi sa fierté de voir son œuvre diffusée aujourd’hui dans le monde entier.
"on histoire, celle de La Commissaire, tient entre deux dates : 1967-1987. Ma vie, c’est le trait d’union entre les deux. Diplômé de l’École de Cinéma de Moscou, j’ai voulu raconter les mauvais traitements, le véritable génocide que la révolution naissante a infligé aux juifs d’Ukraine plus de quinze ans avant Hitler. Fou que j’étais ! J’ai bien senti que le scénario gênait, mais je croyais mes compatriotes plus aptes à l’autocritique qu’ils ne prétendaient l’être. Je ne voulais ni provoquer ni épater, mais j’avais mon credo moral déjà prêt. Je sentais, sans vouloir fantasmer, que j’allais à rebours de tout l’enseignement de l’époque. La Commissaire terminée n’a eu qu’une projection, une seule, à l’issue de laquelle on a incriminé l’auteur de tous les péchés de la Russie. J’ai protesté. On est venu chercher les bobines du film. Par la suite, on a dit à ma femme qu’elles avaient été brûlées. J’ai écrit à Souslov. C’était l’éminence grise de la doctrine socialiste. "La destruction d’une œuvre d’art, disait ma lettre, est une action barbare qui n’a pas de sens, et qui évoque la destruction des livres à Nuremberg par un régime odieux." A partir de ce moment, le travail pour moi s’est fait rare. Heureusement, je ne suis pas trop maladroit pour faire des meubles de mes mains. J’ai survécu. Aujourd’hui, à Moscou, avoir eu un film au placard est presque un élément du snobisme. Beaucoup de metteurs en scène se, fabriquent, à peu de frais, une légende de persécuté. Moi, je suis la légende. J’ai vu, de mes yeux, le placard aux œuvres interdites. Et ce ne sont pas, des bobines de films mais des âmes qui y pourrissent..."
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