Youri DOUD
Юрий ДУДЬ
Yuri DUD
Russie, 2020, 108mn 
documentaire
Le VIH en Russie, une épidémie dont on ne parle pas
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ВИЧ в России — эпидемия, про которую не говорят

 

 VICH v Rossii - epidemia, pro kotoryiu ne govoriat

 VICH v Rossii - epidemia, pro kotoryiu ne govoriat

 
Réalisation : Youri DOUD (Юрий ДУДЬ)
 

Synopsis
Dans ce film Iouri Doud tente de répondre aux principales questions concernant la maladie : "Comment pouvez-vous avoir le VIH ? Les personnes atteintes du VIH peuvent elles avoir des enfants en bonne santé ? Peut-on avoir le VIH et vivre pleinement jusqu'à un âge avancé ? Pourquoi la lutte contre le VIH en Russie est-elle si peu efficace?"
Les héros de la vidéo sont des gens qui vivent avec le VIH ou sont en contact permanent avec des malades ayant le VIH. Parmi eux : le professeur Vadim Pokrovski, directeur du centre fédéral de prophylaxie et de lutte contre le sida, les journalistes Anton Krassovski, Margarita Loguinova et d'autres. D'après Krassovski la réalisation du film a pris un an et demi.
 

Commentaires et bibliographie
Des millions de vues en Russie pour une vidéo sur le VIH [Film [Le CIH en Russie de Youri DOUD], RFI, 2020
VIH : un documentaire russe brise les tabous, seronet.info, 2020
 
Avec 15 millions de vues sur la plate-forme de vidéos, le film de Iouri Doud a provoqué une vague d’intérêt sans précédent dans le pays pour ce sujet très sensible.
« Tu es assis tranquillement chez toi, tu es un beau gosse, tout roule pour toi… Tu crois que cette vidéo ne te concerne pas, qu’on va parler d’histoires de junkies… Tu te goures sacrément ! » D’entrée, le ton est donné par l’un des héros du film, Denis Godlevskiï, marié à une jeune séropositive et fondateur d’une association d’aide aux malades.
Et il s’avère diablement efficace, ce ton : deux semaines après sa sortie sur YouTube, le 11 février, le film de Iouri Doud est devenu un phénomène de société. Avec 15 millions de vues sur la plate-forme de vidéos, Une épidémie dont on ne parle pas a conduit à une rare remise en question en Russie sur ce sujet hautement sensible, « un sujet dont on a peur », prévient le blogueur vedette.
Durant près de deux heures, Doud manie l’émotion, la pédagogie, l’humour… Son périple à travers la Russie du sida aborde une foule de sujets, incarnés par des personnages saisissants : modes de contamination, dépistage, différence entre VIH et sida, traitements, discriminations, vie avec la maladie…
Dans la foulée de la diffusion, les recherches sur Internet ont explosé sur le sujet. Dans certaines villes, ces deux dernières semaines, le nombre de visites dans des centres de dépistage a doublé. La demande pour les autotests a été multipliée par dix !
En 2018, 37 000 personnes sont mortes du sida en Russie.
« Je suis médecin et je croyais connaître cette maladie… J’ai honte. » « L’équipe de Doud fait plus pour l’éducation que le ministère de l’éducation », disent deux des centaines de milliers de commentaires suscités par le film sur les réseaux sociaux.
Cette réussite doit beaucoup à la personnalité de Iouri Doud. Ce grand gaillard de 33 ans, aux airs d’éternel adolescent, est une super star d’Internet. Après avoir débuté comme journaliste sportif, il s’est imposé comme un interviewer hors pair. Ses entretiens longs et intelligents, de rappeurs aussi bien que de politiques, cumulent des dizaines de millions de vues sur YouTube.
L’autre raison de cette vague d’intérêt tient à la gravité de la situation sur le front de la maladie. 1,06 million de Russes sont recensés comme séropositifs (sur 146 millions d’habitants). La France, avec une population environ deux fois moins élevée, compte 170 000 cas. Dans treize régions, le taux de contamination dépasse 1 %, et chez les hommes entre 30 ans et 40 ans il atteint 4 %, selon l’expert Vadim Pokrovskii. En 2018, 37 000 personnes sont mortes du sida – soit 100 par jour. Responsabilité des pouvoirs publics Surtout, la tendance est mauvaise. Si l’épidémie recule en ex-URSS et Europe centrale – avec un repli de 4 % de nouveaux cas selon les Nations unies (ONU) entre 2010 et 2019 –, elle continue d’augmenter en Russie (+ 29 %). Entre autres explications, l’Etat finance des traitements antirétroviraux pour seulement la moitié des séropositifs du pays ; les 500 000 autres doivent les financer eux-mêmes ou ne se soignent pas, ce qui contribue à répandre le virus. Doud n’hésite pas, avec ses interlocuteurs, à rendre les pouvoirs publics partiellement responsables de cette catastrophe. « Les experts du ministère de la santé sont littéralement incapables de prononcer le mot préservatif », s’amuse un expert. « Nous sommes dans un Etat où ceux qui font de l’éducation sexuelle pour les mineurs sont appelés “agents de l’étranger” et “pédophiles” », s’étrangle un militant associatif.
Malgré ces sévères attaques, l’onde de choc du documentaire a dépassé Internet. Le porte-parole du président, Dmitri Peskov, a dit l’avoir apprécié. Le président de la Chambre des comptes a de son côté parlé d’un film « nécessaire » et promis de vérifier l’efficacité des dispositifs russes. Seul 1,66 % du budget destiné à la prévention est utilisé pour promouvoir et distribuer des préservatifs.
Le film a été diffusé jusque dans l’enceinte de la Douma, le Parlement russe. Peu de députés sont venus, dit-on, et aucun n’est resté jusqu’au bout. Mais le fait relève de l’exploit dans un pays qui classe bel et bien comme « agent de l’étranger » la plupart des associations de prévention et possède une loi très répressive contre la « propagande homosexuelle ». Les quelques députés présents ont donc pu entendre vanter les mérites de l’association Act Up ...
Benoît Vitkine

Images et vidéos