Le film est consacré à la Commune de Paris.
En 1870, les soldats français partent au front, la bourgeoisie parisienne applaudit aux cris de « A Berlin ! », et continue de vivre une vie joyeuse. Dans le grand magasin « Nouvelle Babylone » c’est l’époque des soldes. La jeune vendeuse Louise est invitée au bal par son patron. Mais la fête tourne court car l’armée française est battue et les Prussiens marchent sur Paris. La bourgeoisie qui fêtait hier les soldats est prête aujourd’hui à capituler mais le peuple de Paris ne veut pas se rendre. Louise se joint aux femmes du peuple pour aller à Montmartre tenter, en vain, de convaincre les militaires de combattre l’ennemi. Et le soldat Jean, paysan rencontré et hébergé par Louise, sans bien comprendre ce qui se passe, suit les chefs militaires à Versailles. Le peuple s’insurge, investit l’hôtel de ville et organise avec enthousiasme un « gouvernement » de la commune de Paris. Mais le pouvoir regroupé à Versailles prépare la vengeance. Paris est mis à feu et à sang, les insurgés sont fusillés, parfois après avoir été jugés à la hâte par un tribunal d’exception. Louise est condamnée à mort pendant que Jean creuse des tombes, dont celle de sa bien-aimée.
"Dans notre adolescence, à l’apogée de cette exaltation qu’avait provoquée l’apparition de l’art cinématographique, certaines images de films que nous ne pouvions voir nous hantaient. Ainsi celles de La Nouvelle Babylone. Elles étaient si insolites qu’elles étaient, avec les photographies du Chien andalou , les seules à paraître au diapason de notre exaltation.
Depuis, nous avons vu La Nouvelle Babylone. L’œuvre défie toute classification. Elle surgit en 1929, dix ans après Caligari, bien après la fondation de la FEKS, après le moment où le cinéma soviétique avait dégagé sa voie.
Il ne peut être question dans ce film, qui évoque pourtant sans cesse Damier, de parler de réalisme. Il ne peut être question non plus, bien qu’aucun film soviétique n’ait jamais connu une telle déformation des lignes, une telle simplification des traits, de parler à son propos de formalisme.
S’il est exact, comme l’a dit Hugo, que l’œuvre épique est de l’histoire écoutée aux portes de la légende, La Nouvelle Babylone est le seul film épique authentique du cinéma.
Par ailleurs, ce film au rythme inouï, est le seul qui soit une transcription cinématographique de la chorégraphie, un extrait des Deux Orphelines de Griffith mis à part. Il est construit comme un véritable ballet, il évoque sans cesse les tableaux colorés, les plus expressifs, les plus passionnés, les plus chargés de rythme des grands ballets qui marquèrent les premières saisons, entre 1909 et 1913, du ballet russe. C’est la danse macabre du Second Empire et de la Commune de Paris."
Cinémathèque française, Soixante ans de cinéma (cité par Le cinéma russe et soviétique, L’Equerre, Centre Georges Pompidou)
"(…) Le film lyrique, d’une grande intensité dramatique, réalisé par la FEKS, donne une description cinématographique, dans un ton qui lui est propre, de la société française au temps de la guerre franco-prussienne et de la Commune. (…) A l’aide de la construction des plans, du jeu de l’ombre et de la lumière, des raccourcis et d’un montage assez habile, les réalisateurs ont réussi à reconstituer le Paris élégant bien connu, celui des brillants dandies, des cocottes, des cafés-concerts et des boulevards. Kozintsev et Trauberg ont réussi à atteindre de meilleurs résultats que Renoir dans son film Nana. Les personnages des ouvriers et les scènes de la Commune son beaucoup moins convaincants.
Le second problème qui se posait aux réalisateurs, rendre le côté émotionnel de la Commune n’a pas été résolu. (…)
L’opérateur Moskvin, déjà connu des spectateurs soviétiques pour ses travaux précédents (Le Manteau, SVD) a atteint une très grande hauteur. Dans ce film, particulièrement dans les prises de vues dans le brouillard, il nous donne des exemples complets de l’écriture cinématographique. La FEKS travaille dans un esprit collectif très uni. Cela se sent dans le travail de tous ses membres, techniciens et acteurs. (…)"
N. Feldman 25/3/1929 (cité par Le cinéma russe et soviétique, L’Equerre, Centre Georges Pompidou)
Dossier :
On trouvera un dossier intéressant sur la musique de Chostakovitch pour le film sous la forme d'une interview du chef d'orcheste Olivier Holt réalisée pour le site ANACLASE. com