Vsevolod MEYERHOLD
Всеволод МЕЙЕРХОЛЬД
Vsevolod MEYERHOLD
Russie, 1915, 2124m 
Noir et blanc, muet, fiction
Le Portrait de Dorian Grey
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Портрет Дориана Грея

 

 Portret Doryana Greya

 Portret Doryana Greya

 
Réalisation : Vsevolod MEYERHOLD (Всеволод МЕЙЕРХОЛЬД)
D'après le roman d'Oscar Wilde
 
Interprétation
Vsevolod MEYERHOLD (Всеволод МЕЙЕРХОЛЬД) ...Lord Henry Wotton
Varvara YANOVA (Варвара ЯНОВА) ...Dorian Grey
 
Images : Aleksandr LEVITSKI (Александр ЛЕВИТСКИЙ)
Décors : Vladimir EGOROV (Владимир ЕГОРОВ)
Production : Série d'or russe
 

A noter :
Le film n'a pas été conservé
 

Commentaires et bibliographie
 
"Thiemann suggéra d'abord à Meyerhold de tourner L'Homme qui rit d'après Hugo, puis La Gioconda d'après d'Annunzio; finalement ce fut Le Portrait de Dorian Gray de Wilde qui l'emporta.
Meyerhold entreprit lui-même de découper dans la « broderie chatoyante » d'Oscar Wilde, une histoire cinématographique cohérente, en tâchant d'éviter l'erreur des producteurs français et danois qui, du même sujet, avaient fait un film d'épouvanté.
Cet avant-gardiste authentique se plongea dans son travail, y consacrant son immense énergie et toute son imagination. Il usa de tous les moyens pour donner corps à ce récit symbolique, noyé dans une atmosphère décadente où s'entremêlent le luxe et une subtile horreur. Peu nombreux furent les décors spécialement construits pour ce film; on les confia à Vladimir Egorov, cependant que Meyerhold empruntait à ses nombreux amis moscovites force « accessoires » luxueux et raffinés.
La distribution fut largement choisie en dehors du personnel habituel des studios. Meyerhold s'attribua le rôle de Lord Henry Wotton; enfin, celui si difficile de Dorian fut donné à une femme, Varvara Yanova.
Meyerhold transposa au cinéma des éléments de ses théories théâtrales concernant la photographie et les éclairages; il obtint ainsi des effets absolument inédits. Le film entier fut composé d'images où contrastaient des masses parfaitement blanches et des masses parfaitement noires; tantôt un personnage dramatiquement éclairé se détachait d'un fond noir; tantôt quelque silhouette foncée frappait le regard sur un arrière-plan lumineux; telle était cette image, montrant Dorian, drapé dans son manteau, debout devant une affiche toute blanche, illuminée par un simple réverbère.
Un des épisodes les plus vivement originaux se passait au théâtre; on pouvait voir, dans le miroir de la loge, derrière le spectateur Dorian, une scène de Roméo et Juliette.
Pour ponctuer son film, Meyerhold usa de quelques épi-grammes de Wilde. La rencontre de Dorian avec Basil Hallward amenait cette conclusion : "Le rire n'est pas du tout un mauvais moyen pour com¬mencer une amitié; c'est de loin, le meilleur d'en finir une." Un gros plan de Dorian avec Lord Henry Wotton était précédé par "La seule façon de se débarrasser d'une tentation, c'est d'y succomber. Résistez-y et votre âme sera malade à force de soupirer pour ce qu'elle s'interdit." D'autres épigrammes remplissaient des fonctions similaires.

Le film, d'une longueur de trois bobines, avait été prévu avec quatre-vingt-deux scènes différentes — nombre très grand pour l'époque. Dans la préparation, on consacra un temps inhabituel à faire répéter les acteurs. Le résultat fut porté aux nues par les critiques intelligents et, assez généralement, peu apprécié du grand public. Peu de gens avaient osé jusque-là réaliser un film aussi hardi et aussi original. Des artistes russes qui le virent, et qui virent aussi plus tard, en Europe occidentale, Le Cabinet du Docteur Caligari, me l'ont dit : si Dorian Gray avait pu sortir de Russie, sa réputation de sommet du cinéma aurait dépassé celle de Caligari. Sans conteste, c'est le plus important de tous les films réalisés en Russie avant la Révolution de Février.

Ainsi, pour 1915, le niveau le plus bas était atteint par Sonka et son sensationnel de beuglant; le plus haut, c'était le luxe et le mystère subtil du Portrait de Dorian Gray. Mais entre ces deux extrêmes fleurissaient de nombreux films moyens, bien oubliés."
Jay Leyda, Kino, histoire du cinéma russe et soviétique

Images et vidéos
 

Varvara Yanova et Vsevolod Meyerhold
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